Lors de sa conférence annuelle organisée le 2 février dernier, la Fédération pour la Promotion du Commerce Spécialisé (PROCOS) a dressé le bilan du commerce spécialisé en 2021 en révélant des résultats encore fragiles par rapport à 2019, malgré la hausse des ventes en magasin par rapport à l’année 2020 (+11,4%). Un éventuel retour à la normal semble encore lointain pour 2022, année probablement marquée par une hausse des prix et un changement durable des modes de consommation.
Fermeture des centres commerciaux de début février à mi-mai, pass sanitaire obligatoire, 5ème vague… De nouveau marquée par la crise, l’année 2021 n’a pas été de tout repos pour le commerce spécialisé dont les chiffres restent néanmoins meilleurs que l’année 2020.
Une reprise progressive en 2021
Sur l’ensemble de l’année, alors qu’une partie importante des magasins ont durablement fermé leurs portes (3,5 mois pour le commerce spécialisé́ en centres commerciaux), l’activité́ a été sensiblement meilleure qu’en 2020 aussi bien pour les magasins (+ 11,4 %) que pour les ventes internet des enseignes du panel (+ 14,8 %). Après une baisse en août avec la mise en place du pass sanitaire dans les centres commerciaux et les grands magasins, PROCOS analyse une bonne reprise à partir des mois de septembre jusqu’à novembre (+16,5% en novembre comparé à novembre 2020 qui avait connu un écroulement de -75%). Le mois de décembre, quant à lui, a connu une baisse de -4,6% puisqu’en 2020, tous les achats avaient été concentrés sur ce mois-ci.
Aussi, certains secteurs performent davantage que d’autres, et cela a notamment été le cas pour l’équipement de la maison. Après une année 2020 exceptionnelle en raison de l’engouement des Français pour leur habitat, changeant alors de priorités et de modes de vie, la dynamique a perduré en 2021 avec une croissance de +14,2% en magasins et de +13,9% sur le web. Investir dans son logement (bricolage, information, jardinerie, décoration) semble donc être devenu une habitude durable, d’autant plus que ce secteur profite du télétravail et d’une vie sociale qui demeure, malgré les récentes améliorations, quelque peu réduite.
Une année en retrait par rapport à 2019, sauf pour l’équipement de la maison
L’année 2019 étant considérée comme une » année normale «, PROCOS s’est recentré sur cette dernière pour analyser ces données de manière plus juste. Cette comparaison montre, pour les points de vente, un recul de -8,7% des ventes en magasins par rapport à l’avant Covid.
Néanmoins, deux secteurs connaissent des ventes magasins supérieures : l’équipement de la maison (+11,4%) et l’alimentaire spécialisé (+3,9%). En cumul vente magasins et activité́ web, l’activité́ des enseignes reste en retrait de -4,5 % par rapport à 2019. Les deux secteurs précédemment cités tirent toutefois leur épingle du jeu. PROCOS accentue notamment ses propos sur l’univers du bricolage dont le chiffre d’affaires a augmenté de 11,6% en valeur, à la suite d’un record de +13% en 2020 selon la FMB (Fédération des magasins de bricolage et de l’aménagement de la maison).
L’omnicanalité poursuit son chemin
Les évolutions des ventes web deviennent plus hétérogènes selon les secteurs et PROCOS constate une baisse alarmante des fréquentations en point de vente. Depuis le début de la crise, la fréquentation moyenne des points de vente a connu une baisse de -19,4%. En janvier 2022, elle s’est encore accélérée avec un recul de -28,8%.
En plus d’être une conséquence directe de la crise sanitaire, il s’agit plus globalement d’une transformation du commerce, se dirigeant vers un modèle omnicanal dans lequel le client se déplace beaucoup moins souvent en magasin, tous secteurs confondus. Il n’est donc pas étonnant de constater la croissance des ventes web des enseignes, progressant alors de +14,8% en 2021 (contre 13,5% fin 2020).
» Ces chiffres n’annoncent pas la mort du magasin. Mais le poids du web est extrêmement variable et s’est accéléré dans tous les secteurs. Nous estimons qu’en 2030, nous passerons aux alentours de 30% du poids du web dans le cadre d’une approche omnicanal. La question du coût d’exploitation des points de vente se pose alors de plus en plus « précise Emmanuel Le Roch, Délégué Général PROCOS. De surcroît, il est important de montrer que pour l’instant, le web ne permet de rattraper que de l’ordre de 5% du CA perdu sur les magasins. Dans les prochains mois et années, cette situation entraînera des conséquences certaines sur le format des magasins, le niveau de loyer et charges supportables pour les points de vente et la densité des réseaux de magasins.
Perspectives 2022 : quel contexte pour la consommation et le commerce ?
Sans dire que la crise est derrière nous, un certain regain d’optimisme domine mais les incertitudes perdurent.
Avec une forte croissance du PIB français en 2021 (+7%) et un pouvoir d’achat qui devrait être en hausse, l’INSEE imagine un scénario optimiste pour 2022, avec une croissance éventuelle de +6,1%.
Le contexte reste toutefois soumis aux contraintes sanitaires et à l’évolution des prix, entraînant alors de nombreuses incertitudes pour le commerce spécialisé. Au mois de janvier 2022, l’activité du commerce spécialisé est restée très impactée par la Covid, notamment en raison du télétravail obligatoire et des craintes concernant la contagiosité du virus. Une situation préjudiciable qui créé alors de nombreuses incertitudes sur la consommation (hausse des prix, pouvoir d’achat, contexte particulier lié aux élections présidentielles) mais aussi sur les coûts d’exploitation en forte hausse (coûts d’approvisionnements, difficultés de recrutements, écrasement des marges…).
Ces fortes pressions sur le modèle économique qui persistent ainsi que la crise sanitaire sont des éléments de réflexion à prendre en considération pour les années à venir. Les acteurs du commerce spécialisés se demandent si la baisse de fréquentation des points de vente perdurera, notamment celle des centres commerciaux et centres villes qui demeure considérable, et si les citoyens seront, oui ou non, de plus en plus réticents à se déplacer. À cela s’ajoute la hausse permanente des coûts immobiliers (loyers, charges locatives, fiscalité) dans une période où nombreux commerces ne peuvent les supporter. La pandémie a révélé la fin d’un cycle pour l’immobilier commercial, qui doit alors chercher de nouveaux relais afin de garantie la viabilité du commerce spécialisé.
LE LIVRE BLANC POUR ACCÉLRER LA TRANSFORMATION DU COMMERCE
» Les incertitudes sont fortes, les transformations complexes mais les acteurs du commerce français réagissent avec beaucoup d’agilité, d’innovation et d’énergie, ce qui n’est pas, à l’heure actuelle, une tâche aisée. Ce livre blanc représente une nouvelle étape d’un commerce qui se veut plus responsable, créatif et innovant. Les Assises du Commerce ont alors permis d’aligner l’ensemble des positions des acteurs du commerce « déclare Emmanuel Le Roch. Le commerce occupant une vraie place dans notre société, PROCOS a souhaité y accélérer sa transformation en créant un livre blanc répondant aux défis digitaux, environnementaux et aux nouvelles habitudes de consommation des Français.
27 enjeux et actions – s’appuyant sur sondage réalisé auprès de 51 enseignes et du témoignage de 13 dirigeants ou direction RSE d’enseignes – sont ainsi dévoilés. Au total, 90% des enseignes ont mis en place des actions environnementales et sociales tandis qu’ils sont 65% à les avoir déclinées sous forme de politique RSE globale. Côté social, 86% des entreprises ont mis en place des politiques de formations suivies et mesurées et l’amélioration des conditions de travail et la mixité sont développées et contrôlées par plus de 80% des enseignes.
En mettant en lumière les initiatives inspirantes des enseignes, pour y relever les contraintes et les limites, et encourager la mise en place de stratégies RSE au sein des entreprises et soumettre des pistes d’amélioration, ce livre blanc s’inscrit dans une vision novatrice du commerce qui, pour perdurer, doit se transformer durablement.